Aujourd’hui, dans cette nouvelle interview de maman, c’est Emilie qui partage avec nous les raisons qui l’ont poussée à choisir une crèche alternative pour son enfant et les bénéfices qu’elle en retire au quotidien. Son témoignage en tant que maman, coach parentale, et résidente de Barcelone depuis de nombreuses années, apporte un avis précieux sur son expérience des crèches alternatives !
Un grand merci à Émilie pour le temps qu’elle a consacré à cette interview.
Je m’appelle Émilie, Française installée à Barcelone depuis 22 ans, et maman comblée d’un petit garçon de 2 ans et demi, Franco-Italien né ici. Passionnée par le développement de l’enfant et convaincue de l’impact de notre enfance sur notre vie d’adulte, j’ai choisi de devenir Coach parentale. À travers mon métier, j’accompagne les parents dans la construction d’une relation harmonieuse et épanouissante avec leurs enfants, pour leur permettre de profiter sereinement de cette période précieuse qu’est l’enfance. Vous pouvez me retrouver sur www.emilieonfray.com
Pourquoi avez-vous choisi une crèche alternative pour votre enfant ?
En tant que Coach Parentale formée à la parentalité positive, j’ai une approche profondément respectueuse de l’enfant et de ses besoins fondamentaux. Il était donc essentiel pour moi de trouver un lieu qui partage ces mêmes valeurs et cette même vision de l’enfance. L’étape de 0 à 6 ans est une période cruciale pour établir une base cognitive, sociale et émotionnelle solide. Nous souhaitions que notre enfant soit entouré de professionnels formés à cette approche, et capables de répondre à ses besoins dans le respect de son développement.
Les critères les plus importants étaient la vision de l’enfance, la posture de l’adulte dans son accompagnement, ainsi que la pédagogie. Nous cherchions un lieu où les adultes ont une solide compréhension du développement de l’enfant : comment fonctionne son cerveau, ses émotions, ainsi que ses besoins (physiologiques, cognitifs, moteurs et affectifs). L’environnement devait favoriser son autonomie et respecter son rythme, tout en assurant un ratio éducatrice-enfants assez bas (1 éducatrice pour 4 à 6 enfants maximum).
Avez-vous envisagé d’autres modes de garde (nounou, crèche traditionnelle) avant de faire ce choix ?
Idéalement je souhaitais une crèche Montessori pour la pédagogie mais dans mon quartier il n’y en avait pas et les prix restent élevés. Nous avions considéré l’option d’une nounou pour le ratio bas mais cette option était nettement plus chère. Finalement, l’approche de la crèche alternative correspondait davantage à nos attentes en termes d’accompagnement éducatif et de valeurs et de budget.
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Qu’est-ce qui vous a attiré vers le réseau Educació Lliure et ses principes pédagogiques ?
Ce qui nous a immédiatement attirés c’est que cela correspondait exactement à ce que je recherchais : le regard porté sur l’enfant, le respect de son rythme et de ses besoins, ainsi que la posture bienveillante de l’adulte. Le projet pédagogique, qui intègre une attention particulière aux ratios (nombre d’enfants par éducatrice), était aussi un point essentiel.
Comment s’est passée l’adaptation de votre enfant dans ces crèches ?
L’adaptation a été progressive et respectueuse du rythme de notre fils dans les deux crèches où il a été. Dans la première crèche, el Monstre de paper, à ses 10 mois, le processus d’adaptation s’est déroulé de manière très douce. Le premier jour, je suis restée avec lui une heure, puis progressivement, nous avons augmenté le temps passé seul à la crèche. Il a d’abord commencé par de courtes matinées, puis nous avons ajouté les repas, et enfin, les siestes. Chaque étape a été ajustée à son rythme, ce qui a permis de réduire son stress et de le rendre plus serein.
Lors de son passage dans une nouvelle crèche, El Tatanet, à 2 ans et demi, l’adaptation s’est également faite de façon progressive. Nous avions l’avantage qu’il connaissait déjà les lieux puisque nous y allions parfois pour y jouer en extra-scolaire. Il y a d’abord eu une réunion avant la rentrée avec les enfants et les parents pour créer une familiarité. Ensuite, la première semaine, il n’y allait que le matin, le premier jour avec moi puis seul, et à partir de la deuxième semaine, les repas ont été intégrés puis enfin les siestes.
Ce processus respectueux permet à l’enfant de se sentir en sécurité et de créer un lien d’attachement avec les éducatrices, ce qui est fondamental pour une bonne adaptation.
Quels sont les principaux avantages que vous avez constatés en choisissant ce type d’établissement pour votre enfant ?
Ce n’est pas seulement un lieu de garde, c’est un lieu de vie pensé pour favoriser un développement respectueux, harmonieux et optimal de l’enfant dans toutes ses dimensions : cognitive, émotionnelle, physique, sociale et créative.
Les principaux avantages sont liés à l’environnement et à la posture des éducatrices. Le cadre est calme, avec un petit groupe d’enfants, ce qui permet à l’adulte de respecter le rythme et les besoins de chaque enfant. Un enfant dont les besoins sont respectés est calme et serein.
Par exemple, la plupart des crèches passent de deux siestes à une seule dès l’âge de 12 mois, alors que les études scientifiques recommandent de conserver deux siestes jusqu’à environ 18 mois. Au Monstre de paper, j’ai pu demander que mon fils continue à faire deux siestes jusqu’à ses 18 mois, ce qui a été respecté. Cette flexibilité et cette attention à ses besoins ont permis d’éviter les déséquilibres physiologiques et émotionnels (crises) liés au manque de sommeil. À l’inverse, dans une crèche traditionnelle, une amie a dû se conformer aux règles imposées au groupe, bien que son enfant ait encore besoin de deux siestes après ses 12 mois. Cette adaptation forcée a engendré des troubles du sommeil et une nervosité accrue chez l’enfant, en raison d’une fatigue excessive.
Quel est votre budget mensuel consacré à cette crèche ?
Le budget mensuel est compris entre 350 € et 400 €, en fonction des horaires.
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Quels sont les frais supplémentaires éventuels (repas, activités, sorties, etc.) ?
Les repas sont pris en charge par les familles. Chaque famille cuisine une fois tous les 10 à 12 jours pour le groupe, ce qui permet d’assurer des menus sains et équilibrés, tout en réduisant les coûts.
Il faut compter 140€ de frais d’inscription. Pour le reste, il n’y a pas de frais supplémentaires.
Est-ce que cette crèche bénéficie d’aides, comme par exemple en crèche publique, où la troisième année peut être gratuite ?
Non, il n’existe pas d’aide pour ce type de crèche.
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Selon vous, ce rapport qualité-prix est-il justifié ?
Absolument. Le rapport qualité-prix est excellent, surtout compte tenu de la qualité de l’accompagnement proposé et de l’impact positif que cela a sur l’enfant.
Quelles sont les démarches administratives à effectuer pour inscrire un enfant dans cette crèche ?
Les démarches sont très simples. Il suffit de contacter la crèche pour un premier rendez-vous. Pour confirmer l’inscription, il faut payer les frais d’inscription, ainsi qu’un mois d’avance pour réserver la place.
Les horaires sont-ils flexibles ?
Oui, les horaires sont flexibles. Selon l’établissement, vous pouvez laisser votre enfant entre 9 h 00 et 9 h 30 ou 10 h 00 le matin, et l’après-midi jusque 15 h 00, 15 h 30 ou 16 h 00.
Comment se passent les communications entre les parents et l’équipe éducative ?
La communication est un aspect très soigné dans ces crèches. Elle s’organise en deux temps :
1. Réunions mensuelles : Une fois par mois, il y a une réunion pédagogique avec tous les parents, sous forme de guidance parentale. Ces rencontres permettent de discuter de thèmes importants comme la continence, la pose de limites, les émotions, l’alimentation, etc.
2. Communication individuelle : Elle se fait au jour le jour, selon les besoins, via Whatsapp ou en entretien individuel sans la présence de l’enfant, ce qui permet d’aborder des questions spécifiques en toute sérénité.
Quelles sont les modalités de remplacement en cas d’absence de l’enfant ou de l’éducatrice ?
En cas d’absence de l’éducatrice, une personne de substitution est prévue pour la remplacer.
Comment sont gérées les limites et les règles dans ces crèches ?
Les limites et les règles sont posées avec beaucoup de respect et de bienveillance. Elles sont claires et connues des enfants. Les éducatrices accompagnent les enfants sans recours à la violence physique ou psychologique, en évitant les jugements, menaces, chantages, punitions, isolements ou humiliations. Tout est fait pour que l’enfant comprenne les règles dans un cadre bienveillant.
En quoi les pédagogies inspirées de Waldorf et Montessori apportent-elles un plus à l’apprentissage de votre enfant ?
Ce ne sont pas des écoles officiellement Waldorf ou Montessori, mais les éducatrices sont formées à ces pédagogies ou s’en inspirent. L’apprentissage est vu comme un processus global qui dépasse le simple aspect intellectuel. Ces pédagogies prennent en compte les dimensions émotionnelle, corporelle, sociale et créative de l’enfant, tout en respectant son développement intellectuel. Le jeu est central dans cet apprentissage et comprend des activités diverses : contes, musique, psychomotricité, expérimentation manuelle.
(Photo @El Monstre De Paper)
L’approche pédagogique se base aussi sur la posture de l’adulte, qui guide l’enfant plutôt que de le diriger. L’adulte respecte les intérêts, le rythme et les besoins de chaque enfant, tout en favorisant son autonomie et sa concentration.
Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de situations où vous avez vu cette approche bienveillante à l’œuvre ?
Un exemple marquant est la gestion du temps d’adaptation. Chaque enfant est accompagné à son rythme, sans pression, pour qu’il se sente en sécurité. Un autre exemple est la manière dont les éducatrices posent des limites. Par exemple, lorsqu’un enfant tape, mord ou jette des jouets, l’éducatrice intervient calmement, en redirigeant le comportement sans punir ou humilier. Elle est là pour guider l’enfant avec calme et bienveillance, et veille à ce que chaque enfant soit respecté et respecte les autres ainsi que le matériel. « Tu veux ce jeu et c’est Pierre qui joue avec. Tu peux lui dire que quand il aura fini de jouer avec tu es intéressé ». Elle accompagne l’enfant dans la compréhension de ses émotions, sans jugement, en lui disant par exemple : « Je vois que tu es en colère parce que tu veux ce jeu, mais c’est Pierre qui l’a pour l’instant. »
Quelles sont les activités proposées aux enfants pour favoriser leur développement ?
Les activités principales sont centrées sur le jeu libre, le jeu symbolique, le jeu en groupe ou individuel, et le jeu psychomoteur. Le chant, la musique et les contes font également partie du programme, ainsi que des activités manuelles comme faire du pain ou dessiner. La participation est toujours libre, sans obligation pour les enfants.
Comment se fait l’accompagnement émotionnel des enfants ?
L’accompagnement émotionnel est réalisé avec beaucoup de calme et d’empathie. Les éducatrices sont sensibilisées aux avancées en neurosciences et savent que le cerveau de l’enfant est immature, et qu’il n’est pas encore capable de réguler ses émotions par lui-même. Elles accueillent toutes les émotions sans jugement, en mettant des mots sur ce que l’enfant ressent : « Tu es triste car ton château s’est effondré » ou « Tu es en colère car tu voulais jouer avec ce jouet. » Sans minimiser « ce n’est pas grave », sans stopper l’émotion « arrête de pleurer » ou sans juger « ce n’est pas bien » mais en accueillant ce que l’enfant ressent. Elles l’aident ainsi à comprendre ce qui lui arrive et à développer progressivement son intelligence émotionnelle.
En quoi ce suivi est-il important pour vous et pour votre enfant ?
Ce suivi est essentiel pour permettre à notre enfant de développer son intelligence émotionnelle et de se construire de manière saine. Il apprend à reconnaître ses émotions, à les réguler sans causer de mal à lui-même ou aux autres, tout en respectant le matériel.
J’avais besoin d’une cohérence entre notre approche à la maison et celle de la crèche.
Avez-vous ressenti un soutien particulier de la part des éducatrices lors de moments plus difficiles (maladie, séparation, etc.) ?
Oui, particulièrement pendant les temps d’adaptation ou lors de moments où notre enfant avait besoin de soutien spécifique. Les éducatrices sont toujours présentes et attentives aux besoins de chaque enfant.
Quelles sont les principales différences que vous avez observées entre cette crèche et d’autres établissements que vous connaissez ou dont vous avez entendu parler ?
Les principales différences résident dans la phase d’adaptation, le respect des besoins physiologiques (sommeil, élimination, alimentation, contact physique) et des besoins secondaires (mouvement, autonomie etc.) de chaque enfant, la pose de limites bienveillantes, l’accompagnement émotionnel.
Il y a aussi la communauté qui se crée entre les familles car les parents sont très investis.
C’est une approche différente dans sa globalité, qui met au centre le respect de l’enfant et son bien-être.
Quels conseils donneriez-vous aux parents qui hésitent à choisir ce type de crèche ?
Les 6 premières années de l’enfant sont décisives pour poser les bases d’un développement équilibré et harmonieux qui influencera l’enfant tout au long de sa vie. Si les parents ont la possibilité de concilier leurs obligations familiales avec le fonctionnement d’une crèche alternative, je leur conseillerais de ne pas hésiter. Les bénéfices se reflètent dans le bien-être global de l’enfant, et par conséquent, dans celui de toute la famille.